par Maurice Y. Michaud (il/lui)
Du début de la Confédération en 1867 jusqu'à environ 1874, un politicien pouvait siéger à son assemblée provinciale ainsi qu'au parlement fédéral dans le cadre de ce qu'on appelait le « double mandat ». L'homme représenté sur cette page, le libéral ontarien Edward Blake, a poussé cela à l'extrême : pendant quelques mois en 1871–1872, il était le premier ministre de l'Ontario ainsi que le député fédéral de Durham West. De même, Pierre-Joseph-Olivier Chauveau était le premier ministre du Québec ainsi que le député fédéral pour le Comté de Québec du début de la Confédération jusqu'à sa démission des deux sièges au début de 1873, alors qu'Amor De Cosmos siégeait au fédéral dans Victoria tandis qu'il était le premier ministre de la Colombie-Britannique en 1873. Mais lorsque Wilfrid Laurier a voulu faire le saut en politique fédérale, il a d'abord dû démissionner de son siège de Drummond-Arthabaska à l'assemblée du Québec, le double mandat ayant été aboli.
Ceci dit, un politicien qui n'était pas certain de ses chances de remporter un siège aux élections générales pouvait se présenter dans plus d'un comté, au cas où il perdrait dans son comté habituel. Le cas ultime où quelqu'un a fait cela était en 1878, lorsque John A. Macdonald s'est présenté dans Kingston, Marquette et Victoria (Colombie-Britannique). Sa prémonition était juste car il a perdu son siège habituel de Kingston mais a remporté Marquette et Victoria. Il a gardé ce dernier et démissionné du premier (remporté sans opposition), ce que les gens faisaient alors... sauf Laurier qui, de 1911 à 1917, a conservé les deux sièges qu'il avait remportés : Québec-Est (remporté sans opposition) et Soulanges. Pourquoi lui a-t-on permis de faire cela ? Peut-être qu'un premier ministre sortant avait un certain privilège, ou qu'aucun autre libéral n'était disposé ou capable de représenter le comté.
Entre-temps, rien n'empêchait quelqu'un (particulièrement au Québec) de siéger à l'assemblée provinciale ainsi qu'être conseiller municipal ou maire. On peut penser à Simon-Napoléon Parent, qui était premier ministre du Québec et maire de Québec au tournant du dernier siècle; le député conservateur Camillien Houde dans Montréal—Sainte-Marie alors qu'il était maire de Montréal, ou même Maurice Tessier qui était à la fois député libéral et maire de Rimouski à la fin des années 1960. Ce ne sont que quelques exemples parmis des centaines, mais comme la politique municipale n'est pas couverte par PoliCan et que cette pratique a cessé partout rendu aux années 1980, je crains qu'il en revient à vous de trouver tous les autres.
Alors voici la liste des hommes ayant exercé un double mandat dans le sens entendu au XIXe siècle. Les doubles mandats n'ont jamais été autorisés au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse et à l'Île-du-Prince-Édouard; ils ont été abolis en Ontario en 1872; au Manitoba et en Colombie-Britannique en 1873, et au Québec en 1874. Il y en a eu 35 avant son abolition, la plupart au Québec:
Je vous conseille de lire cet excellent article sur le site Web de l'Assemblée nationale du Québec qui définit très bien le double mandat et qui élabore les arguments pour et contre cette pratique.