par Maurice Y. Michaud (il/lui)
Jamais personne n'a dit : « Nous voulons plus de député·e·s à Ottawa ! » Mais à mesure que la population du Canada continue de croître, c'est peut-être une fatalité. Au fédéral, l'intention a toujours été que le nombre de sièges pour chaque province devrait étre proportionnel à son poids démographique au sein de la fédération. Toutefois, il n'a pas fallu longtemps pour que certaines provinces voient leur nombre de sièges aux Communes diminuer, avec d'abord l'Ontario et le Québec, et maintenant aussi la Colombie-Britannique et l'Alberta, ayant une plus forte croissance démographique que le reste du pays. En fait, la population de Terre-Neuve-et-Labrador avait atteint 580 369 habitants en 1993, mais en 2021 elle n'était que de 520 553, sauf que cette province a toujours eu sept sièges au Parlement depuis son entrée dans la Confédération en 1949.
C'est que plusieurs amendements ont été apportés à la formule de représentation, notamment après le tollé qu'avait soulevé le redécoupage de 1966, appliqué pour la première fois en 1968, qui avait retiré 4 sièges de la Saskatchewan et un chaque du Manitoba, du Québec et de la Nouvelle-Écosse. Mais force est de constater que ce sont maintenant les grandes provinces qui sont considérablement sous-représentées au Parlement. En effet, malgré le fait que le nombre de sièges ait monté de 264 en 1968 à 338 au redécoupage de 2012, ajoutant 15 sièges à l'Ontario, 6 à la Colombie-Britannique, 6 à l'Alberta, et 3 au Québec, ces provinces (sauf le Québec) sont demeurées en manque, et les 5 sièges ajoutés au redécoupage de 2022 n'ont guère amélioré leur sort.
Les Ontarien·ne·s semblent rester discret à ce sujet, peut-être parce qu'ils ne l'ont pas remarqué compte tenu de leur si faible taux de participation aux élections, quoique lels n'ont jamais refusé de nouveaux sièges. En revanche, on ne peut pas en dire autant de l'électorat de la Colombie-Britannique et de l'Alberta. Et avec raison ! En 1968, ces deux provinces détenaient respectivement 21 et 19 sièges sur 266 alloués aux provinces. Grâce au redécoupage de 2022, basé sur le recensement de 2021, elles ont depuis doublé leur nombre de sièges en atteignant 43 et 37 des 340 sièges provinciaux. Mais comme l'illustre ce tableau, une faille dans la formule de représentation actuelle, couplée peut-être à un souci d'éviter une explosion du nombre de sièges au Parlement, perpétue la sous-représentation de ces deux provinces et de l'Ontario.
Donc pourquoi ne pas repenser la formule ? Pas la jeter ! Juste la repenser. Parce qu'on ne peut quand même pas jeter aveuglément ce qui est inscrit dans la Constitution...