L’encyclopédie électorale du Canada
Un beau rapport qui n’a mené à rien
(sauf à la meilleure comparaison entre le SMU et le SPM)
par Maurice Y. Michaud (il/lui)
En 2004, la Commission sur la démocratie législative du Nouveau-Brunswick a présenté son rapport final
proposant que la province change du système majoritaire uninominal (SMU) actuel à un système proportionnel mixte (SPM) propre au Nouveau-Brunswick. Dans leur introduction, les commissaires écrivent : « Malgré les grandes réalisations de notre province sous le régime actuel, nous estimons que les Néo-Brunswickois et les Néo-Brunswickoises peuvent atteindre un autre niveau si nous leur donnons les bons outils, de meilleurs renseignements et un accès plus efficace aux mécanismes décisionnels. » Et lels énumèrent toutes les personnes consultées, à l’intérieur et à l’extérieur de la province, pour produire leur rapport détaillé et équilibré.
Ensuite, rien. Les député·e·s qui ont participé aux travaux de la commission n’ont rien fait. Même les éloges envers le premier ministre de l’époque n’ont servi à rien.
Enfin, la Commission souhaiterait remercier le premier ministre Bernard Lord, dont l’engagement à l’égard des questions de démocratie ne s’est jamais démenti. Sa résolution à susciter une exploration ouverte et franche des façons dont le Nouveau-Brunswick pourrait améliorer et consolider ses pratiques démocratiques pour le bienfait de ses citoyens et citoyennes atteste de son leadership et de sa volonté indéfectible à améliorer la qualité de la vie démocratique au Nouveau-Brunswick.
Je suis probablement le seul, hormis d’autres passionné·e·s d’histoire électorale, à encore consulter ce rapport, plus de 20 ans après sa publication. Par exemple, leur proposition de division de la province en quatre régions est le schéma régional du Nouveau-Brunswick du simulateur SPM. Mais leur tableau comparant le SPM et le SMU par forces et faiblesses est le meilleur que j’aie trouvé sur ce sujet et mérite d’être conservé dans PoliCan.
Le SMU présente de nombreuses faiblesses tandis que le SPM a plus de forces. Pourrait-on remédier aux points considérés comme menant à des « résultats variables » dans le SPM ?
- Représentativité géographique
- Étant donné qu’une personne peut être élue dans une comté où elle ne réside pas, il est quelque peu surprenant de voir ce point évalué comme « fort » dans le SMU mais « variable » dans le SPM. La majorité des élu·e·s dans un système SPM le seraient par SMU pour les sièges locaux géographiquement ancrés, tandis que les régions regrouperaient ces comtés en mode SMU. La flexibilité relative à la résidence pourrait être maintenue pour les sièges locaux, mais la résidence devrait être obligatoire pour les sièges régionaux.
- Gouvernement efficace / Opposition efficace
- L’élection de gouvernements par SMU depuis près de deux siècles a créé un biais en faveur des gouvernements capables de légiférer seuls grâce à leur majorité, ce qui entre en conflit avec la nécessité d’aussi avoir une opposition efficace. Les coalitions et la collaboration entre les partis ne doivent pas être perçues comme un handicap, car c’est précisément ce que l’électorat a demandé dans l’isoloir. Cependant, la réforme du processus électoral nécessitera aussi une réforme des règles de procédure afin d’éviter l’instabilité et les impasses.
- Imputabilité
- Ce point ne devrait même pas être considéré comme un critère pour le système électoral, mais en supposant un instant qu’il le soit, il est surprenat qu’il n’a pas été jugé « faible » pour le SMU et le SPM. Il existe déjà un problème plus large en matière de culture civique qui amène une part de l’électorat à ne pas comprendre que, dans notre système parlementaire, nous ne votons pas directement pour un premier ministre ou un ministre, et une part plus restreinte qui confond les différents paliers de gouvernement (par exemple, quelqu’un qui dit avant de voter dans une élection provinciale : « Je n’ai pas aimé ce que Justin Trudeau a fait, donc je ne voterai certainement pas libéral ! »). Par conséquent, « l’imputabilité », telle que définie ici, devrait être considérée comme une question d’améliorer la culture civique, mais cela ne peut être fait par le système électoral lui-même.
Voyons maintenant à quel point le SMU est un véritable bordel brûlant.
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Maurice Y. Michaud)
Pub.: 15 jun 2025 23:58
Rev.: 30 jun 2025 03:50